3.7  Séjour de rupture : les ressentis

 Isabelle a perçu le séjour de rupture « Comme dégage de là, on ne veut plus de toi, en gros ça était vécu comme cela, entre guillemets car je savais pertinemment qu’elle faisait cela pour mon bien. Mais je me disais aussi au moins comme ça, ils seront tranquilles, ils n’auront plus la… qui les embête tous les jours, mais je savais aussi que c’était pour mon bien. Je descendais sur une pente dangereuse, je fumais beaucoup de cannabis ».

Béatrice dit ne pas savoir, qu’ « on m’a expliqué ça comme un séjour de rupture, on m’a dit voilà, vous ferez en gros une cure avec le quartier, avec votre maison, avec le passé, avec ce qui s’est passé. On va vous envoyer en Afrique, vous allez voir la misère du monde en Afrique, ça va vous remettre en gros les idées au clair puis vous allez revenir […] mais je ne sais pas pourquoi j’ai fait un séjour de rupture […] De les envoyer à l’autre bout du monde et de revenir et puis que ce soit des petits agneaux, ce n’est pas possible. Ça ne se fait pas, ça ne se fait pas comme ça ».

Pascal  a exprimé son consentement « avec joie même. J’adorais l’Afrique et j’étais beaucoup intéressé et quand on m’a dit c’est un séjour pour aller au Mali, moi j’ai toujours aimé depuis mon enfance ».

Bernard l’a « vécu comme un abandon de mes parents. Pas des éducateurs qui m’ont suivi pendant tout le projet. Pour mes parents je n’étais pas capable. Pas capable de faire des choses de ma vie. Je n’allais jamais au bout de ce que je commençais […] Pour mon père ça était compliqué de se dire pourquoi je devais partir, ce qu’il avait raté dans son éducation ».

Françoise explique « ce qui m’a poussé à aller en séjour de rupture, c’est le fait que j’avais envie de partir, n’importe où mais j’avais juste l’envie de partir […] De tout ça, de tout cet environnement nocif pour moi, et qui me faisait vraiment mal ».

  • Nous voyons que la rupture avec l’environnement, la famille, le dispositif, est perçu selon le mineur de différentes façons. Que ce soit vécu comme une opportunité, un besoin, un abandon, une incompréhension, il peut apparaitre dans certaines situations, un manque d’accompagnement. Ce que ne perçoivent pas certains mineurs concernés, c’est l’aspect cindynolitique, c’est-à-dire la recherche d’une réduction des risques, ici par l’éloignement.

Sans le savoir, les séjours de rupture appliquent les principes cindyniques. Nous comprenons mieux pourquoi ce type de mesure est sollicité par les professionnels dans la gestion des risques. Mais là aussi, nous pouvons pointer une réponse aux déficits relevés dans les témoignages sur l’écoute, le dialogue, le soutien, les rencontres dans les dispositifs classiques. Au-delà du simple éloignement, les séjours de rupture semblent pallier à ces déficits.